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20 mai 2016

Sanction : quels sont les droits de l’administration suite à l’annulation, sur sa demande, de l’avis du conseil de discipline de recours ?

Si une collectivité peut légalement reprendre une sanction disciplinaire qu’elle avait été contrainte d’abandonner en raison de l’avis du conseil de discipline de recours proposant l’adoption d’une sanction moins sévère, l’annulation de cet avis par le juge ne conduit pas en elle-même à la disparition rétroactive de la sanction prise conformément à la proposition du conseil de discipline de recours et l’administration, qui doit prendre garde à ne pas sanctionner deux fois son agent à raison des mêmes faits, doit retirer au préalable cette précédente sanction.

Dans le cas soumis au tribunal, la commune de Ris-Orangis avait initialement décidé d’infliger à Mme D. une sanction de révocation par arrêté de juin 2009. Saisi par l’agent, le conseil de discipline de recours d’Ile-de-France avait néanmoins proposé lors de sa séance de janvier 2010 une sanction moins sévère d’exclusion temporaire de fonctions de 18 mois, dont 6 avec sursis. Dans l’impossibilité de conserver sa sanction plus sévère eu égard aux dispositions de l’article 91 de la loi du 26 janvier 1984 (1), la commune avait alors retiré son arrêté de révocation de juin 2009 et substitué à cette sanction celle préconisée par le conseil de discipline de recours par un arrêté d’avril 2010. Estimant néanmoins l’exclusion temporaire infligée insuffisamment sévère, la commune a déféré l’avis du conseil de discipline de recours devant le Tribunal administratif de Versailles qui, par jugement du 9 décembre 2013, a annulé ce dernier pour erreur d’appréciation. Suite à ce jugement, dont Mme D. n’avait pas fait appel, le maire de la commune de Ris-Orangis a décidé de reprendre la sanction qu’il avait initialement infligée à Mme D. et, par arrêté du 19 février 2014, a prononcé une nouvelle fois sa révocation avec effet au 24 février suivant.
Saisi par l’agent d’une requête en excès de pouvoir contre ce dernier arrêté, le tribunal a fait droit aux conclusions de Mme D. pour méconnaissance du principe non bis in idem (2) après avoir constaté que la sanction d’exclusion temporaire de fonctions infligée à Mme D., qui avait entièrement reçu exécution, n’avait jamais été retirée par la commune.
Le tribunal a en effet estimé que, contrairement à ce qu’indiquait la commune en défense, l’annulation contentieuse de l’avis d’un conseil de discipline de recours n’avait pas pour conséquence en elle-même de faire disparaître rétroactivement la sanction infligée conformément à cet avis ni de faire revivre la sanction initialement prononcée par l’autorité territoriale. Il a par ailleurs considéré que suite à une telle annulation, il appartenait toujours à l’administration de déterminer en dernier lieu le degré de sanction elle souhaitait infliger à son agent et qu’à ce titre, si l’autorité territoriale pouvait décider de reprendre une sanction identique à celle initialement infligée, elle n’en avait pas l’obligation et demeurait en particulier toujours libre de ne finalement infliger à son agent qu’une sanction moindre que celle qu’elle avait initialement souhaité prononcer. Enfin, le tribunal a estimé que, dans l’hypothèse où l’administration décidait comme en l’espèce d’infliger in fine une sanction plus sévère que celle imposée par le conseil de discipline de recours, cette sanction ne pouvait être prononcée, sauf à sanctionner deux fois l’agent pour les mêmes faits, qu’à la condition que la sanction intermédiaire infligée suite à l’avis du conseil de discipline de recours ait été elle-même retirée.
(1) « L'autorité territoriale ne peut prononcer de sanction plus sévère que celle proposée par le conseil de discipline de recours. »
(2) : principe qui interdit de sanctionner deux fois à raison des mêmes faits
Sur la possibilité de prendre une nouvelle sanction identique à celle initialement rapportée en raison de l’avis du conseil de discipline de recours annulé par le juge
- CE, SRR, 20 mai 1998, n° 173181, B sur ce point
- TA de Versailles, 7 juin 2004, n° 0104230, B sur ce point, confirmé par CAA de Versailles, 22 décembre 2005, n° 04VE02832 (pas de pourvoi)
Sur les principes qui gouvernent l’intervention d’une nouvelle décision à la suite d’une annulation contentieuse :
- Conclusions sous CE, Section, 26 mars 1965, Lebon p. 196
 
TA Versailles 2016-04-26 n°1403241, C+

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