Le juge de l’impôt statuant dans le champ du droit de l’Union européenne, comme en matière de TVA, doit désormais s’assurer du respect du principe de protection juridictionnelle effective prévu par l’article 47 de la Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne qui comprend différentes composantes, dont le principe des droits de la défense, qui a pour corollaire le droit d’accès au dossier au cours de la procédure administrative. Ce principe implique que le contribuable ait la possibilité de se voir communiquer, à sa demande, les renseignements recueillis par l’administration fiscale tant à charge qu’à décharge (CE 21 septembre 2020 n° 429487, SCI Péronne aux tables du Recueil Lebon).
La société LTE Construction s’est vue assigner des rappels de TVA déductible et des amendes fondés sur des factures établies par quatre sous-traitants que l’administration a regardées comme des factures de complaisance. Pour retenir cette qualification et estimer que la société requérante le savait ou aurait dû le savoir, le service s’est fondé, notamment, sur le contenu des dossiers de sous-traitance de la société LTE Construction, consultés auprès de l’autorité judiciaire et sur les éléments recueillis lors des vérifications de comptabilité de ces quatre sous-traitants. Au cours de la procédure d’imposition, la société requérante a demandé à l’administration de lui adresser les éléments recueillis à l’occasion de l’ensemble des investigations menées auprès de tiers. Le service lui a communiqué, entre autres, les éléments consultés auprès de l’autorité judiciaire et des extraits des propositions de rectification adressées aux quatre sous-traitants, portant seulement sur la présentation des sociétés, leurs effectifs, le respect de leurs obligations fiscales, le déroulement des opérations de contrôle et les moyens d’investigation mis en œuvre par le service.
Compte tenu de la nature et des motifs des rappels et amendes contestés, la formation de jugement a estimé qu’en ne communiquant pas à la société LTE Construction ces propositions de rectification dans leur intégralité, l’administration a privé l’intéressée d’accéder à des éléments qui auraient été de nature à lui permettre de se défendre utilement. Dans ces conditions et alors que l’administration n’a fait état d’aucune circonstance l’ayant empêchée, éventuellement après occultation d’informations couvertes par le secret professionnel, de communiquer l’intégralité de ces propositions de rectification, la formation de jugement a déchargé la société requérante de la totalité des rappels et amendes en cause pour méconnaissance de l’article 47 de la Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne.
TA de Versailles, 21 janvier 2021, n°1806132, Société LTE Construction.