A la demande du préfet des Yvelines et de l’association des musulmans de Mantes Sud, le tribunal administratif a annulé cette décision en retenant le moyen tiré du détournement de pouvoir. (1)
L’association des musulmans de Mantes Sud souhaitait acheter à la communauté d’agglomération de Mantes-en-Yvelines les locaux et le terrain de l’ancienne trésorerie pour y transférer son lieu de culte devenu inadapté. Mais le maire de Mantes-la-Ville a décidé de préempter ce terrain pour y installer un nouveau poste de police municipale, ce qui a empêché l’association des musulmans de finaliser cette acquisition.
Le tribunal a considéré qu’eu égard à la chronologie des faits et aux déclarations du maire de Mantes la-Ville, la décision de préemption, bien que formellement motivée par la nécessité d’installer le service de police municipale dans des locaux plus spacieux, procédait en réalité d’une volonté d’utiliser le droit de préemption afin de faire échec à l’installation d’un lieu de culte musulman. Le tribunal s’est notamment fondé sur l’éditorial du bulletin municipal des mois de juillet et août 2015. Le maire de Mantes-la-Ville y déclarait avoir choisi une destination pour l’ancienne trésorerie « parce que nous nous opposons toujours à ce projet de lieu de culte à cet endroit ». Le tribunal en a conclu que le véritable mobile de la décision était tiré de considérations étrangères à un but d’intérêt général et qu’elle était donc entachée de détournement de pouvoir.
On rappelle que le moyen d’annulation tiré du détournement de pouvoir vise à censurer l’illégalité d’un acte en raison de son but. « Motif et but de l’acte ne doivent pas être confondus. Alors que les premiers sont des données objectives, le but est une donnée subjective, d’ordre psychologique : apprécier le but en vue duquel l’autorité administrative a agi, c’est rechercher quels ont été ses mobiles, son intention ou, si on peut dire, ce qu’elle avait en tête » (2). Le détournement de pouvoir se définit donc comme l’exercice par l’administration d’un pouvoir pour un but autre que celui en vue duquel il lui a été conféré.
(1) L’exécution de la décision de préemption avait tout d’abord été suspendue, sur déféré du préfet des Yvelines, par le juge des référés du tribunal administratif dont l’ordonnance a été confirmée par la cour d’appel administrative de Versailles.
(2) voir manuel du Pr. Chapus Droit administratif général, T. 1, p. 1048 (15ème édition).
TA Versailles, 3ème chambre, 16 septembre 2016, n° 1505143 et n°1506239 en C+